Comprendre la place de l’enfant dans un divorce

enfant a sa place dans un divorce - 2houses

Le divorce (ou la séparation s’il n’y a pas eu mariage) est par définition une situation conflictuelle. En effet, deux personnes se séparent, car elles ne partagent plus un désir de vie commune. Quelle est dans ce contexte la place de l’enfant et sa vision de la séparation ?

Sentiment d’insécurité

Les parents, lorsqu’ils sont ensemble, apportent à l’enfant une sécurité affective. Lors d’une séparation, cette dernière est mise à mal. Cela est d’autant plus vrai à partir du moment où l’un des parents quitte le foyer, car l’enfant peut alors éprouver des craintes importantes et penser qu’il est abandonné par le parent qui part.

C’est pourquoi, dans tous divorces, il est important d’expliquer à l’enfant que les parents, même s’ils ne sont plus ensemble, continuent d’aimer autant leur enfant que par le passé et que ce n’est pas lui qui est rejeté.

L’origine de la séparation peut être une source de remise en question pour l’enfant. Il n’est pas rare que l’enfant s’attribue l’origine de la rupture entre les parents et culpabilise. Pour éviter cela, il est primordial d’expliquer à l’enfant que la décision qui a été prise n’a pas pour origine l’enfant, que ce n’est pas à cause de lui. Expliquer, sans….

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par Benjamin Barry-Colin via pratique.fr

Mon ex-compagnon m’a permis de devenir moi-même

apprendre à se connaitre soi-même - 2houses

Je suis tombée amoureuse d’un homme à un anniversaire. Je ne l’avais vu que de dos, c’était complètement irrationnel. Mais je l’avais choisi, c’était lui. Il s’est retourné, il m’a regardé. À partir de ce moment-là, toute ma vie n’a tourné qu’autour de lui. Nous avons été amants longtemps.

Je souffrais de ne pas le voir s’engager. Je voulais l’épouser, vivre avec lui. Il ne le souhaitait pas. Me demandait d’attendre. Malgré tout, j’étais sur un nuage. Aucun doute, aucune question. Cela a duré deux ans. Et puis un jour, il m’a dit qu’il m’aimait. Il m’a fait une déclaration. La première de ma vie. Il m’a demandé de vivre avec lui et de l’épouser. Le tout en un quart d’heure. Mais au lieu d’être comblée de joie, j’ai regardé mon petit monde fantasmatique s’écrouler. Il voulait juste, enfin, combler mes désirs. Et j’ai fini par comprendre que le fait qu’il soit inaccessible m’arrangeait finalement beaucoup et entretenait mon amour fou. Je m’écroulais d’angoisse.

Malgré mes doutes, j’ai joué le jeu de la femme heureuse. Je suis allée jusqu’à emménager chez lui. impossible de l’avoir autant aimé et de l’avoir autant bassiné avec ça pour maintenant lui dire non. J’étais mortifiée. Je suis restée chez lui presque un an. Sans vraiment défaire mes cartons, sans le présenter à ma famille, sans m’engager vraiment. Tout en restant dans l’illusion que j’allais de nouveau l’aimer, que l’inverse était impossible. Un jour, je suis partie. Ce n’était pas prémédité mais je n’étais pas heureuse, c’était inévitable. Après un entretien d’embauche, j’ai regardé la vitrine d’une agence immobilière. Il y avait un petit appartement pas trop cher à louer. J’avais mon contrat sur moi, je venais de le signer. Je n’ai pas réfléchi. Je l’ai visité dans la foulée et j’ai signé le bail le soir même. Un peu apathique et sonnée, mais convaincue. J’ai emménagé le lendemain après une longue nuit de discussion. Cela s’est passé sans heurts. Je pense que mon comportement avait également éteint son amour pour moi. Il était aussi soulagé que moi. Cette histoire est l’étape la plus importante de toute ma vie jusqu’ici. Elle m’aura permis de comprendre qui je suis, ce que je veux, ce dont j’ai peur.

Maintenant, je ne recherche plus à tout prix l’amour des autres. Je n’attendais que cela pour voler de mes propres ailes. On en a parlé longtemps après. Je lui ai raconté tout ce que je vous écris ici. On en rigole maintenant. C’est devenu un grand ami. Je vais être maman dans quelques temps, et le papa est un homme merveilleux que je n’ai pas fantasmé. Je ne lui ai pas couru après, il n’était pas inaccessible. C’était juste une évidence, et il ne me tournait pas le dos lorsque je l’ai rencontré. Je crois que je n’aurais pas su appréhender une relation de manière équilibrée si je n’en étais pas passée par là.

Article de Cargoulette pour Psychologies.com

Divorce international : vous pouvez choisir votre droit applicable

garde des enfants c'est le juge qui décide - 2houses

Pensez-y ! Désormais, depuis l’entrée en vigueur du règlement européen n° 1259/2010 dit « Rome III », vous pouvez désormais choisir votre droit applicable en cas de séparation de corps ou divorce. Le texte date de décembre 2010 mais est entré en application le 21 juin 2012, motif pour lequel vous n’en avez probablement pas eu connaissance avant cette date.

Cet accord s’applique aux 14 états qui ont décidé d’y participer : Belgique, Bulgarie, Allemagne, Espagne, France, Italie, Lettonie, Luxembourg, Hongrie, Malte, Autriche, Portugal, Roumanie, Slovénie.

En effet, à défaut d’accord entre les époux, c’était au juge de régler le problème de loi applicable, ce qui suscitait de nombreux contentieux et drames principalement à propos de la garde des enfants.

L’application du règlement exclue expressément certaines matières telles que la capacité juridique des personnes physiques, l’existence, la validité ou la reconnaissance d’un mariage, l’annulation de mariage, le nom des époux, les effets patrimoniaux, la responsabilité parentale, les obligations alimentaires ou encore les trusts et successions.

Par ailleurs, ce règlement a une application universelle : la loi désignée par les époux sera applicable même si celle-ci est issue d’un Etat non participant.

Vous ne pouvez néanmoins opter pour n’importe quelle loi. Le choix est circonscrit à quatre possibilités pour limiter les fraudes :

Loi de la résidence habituelle des époux au moment de la conclusion de la convention.Loi de la dernière résidence habituelle des époux pourvu que l’un d’eux y réside encore au moment de la conclusion de la convention.Loi nationale de l’un des époux au moment de la conclusion de la convention.Loi du for (loi du lieu où la juridiction a été saisie)

Vous êtes déjà mariés ? Il n’est pas trop tard. Le choix peut être effectué avant la saisine du juge du divorce (donc en cours de mariage) voire en cours de procédure de divorce si la loi du for le permet.

Si vous n’avez fait aucun choix, Rome III règle néanmoins la question comme suit et la loi applicable est celle de l’Etat :

de la résidence habituelle des époux, pour autant que cette résidence n’ait pas pris fin d’un an avant la saisine de la juridiction et que l’un des époux réside encore dans cet Etat au moment de la saisine de la juridiction ; ou à défaut,de la dernière résidence habituelle des époux, pour autant que cette résidence n’ait pas pris fin plus d’un an avant la saisine de la juridiction et que l’un des époux réside encore dans cet Etat au moment de la saisine de la juridiction ; ou à défaut,de la nationalité des deux époux au moment de la saisine de la juridiction ; ou à défaut,dont la juridiction est saisie.

Le juge règle la question de la même façon que l’auraient fait les époux dans une convention, à la différence qu’ici c’est le juge et non les époux qui font le choix.

Une autre disposition très novatrice, signe de l’évolution des moeurs : Lorsque la loi applicable ne prévoit pas le divorce ou n’accorde pas à l’un des époux, en raison de son appartenance à l’un ou l’autre sexe, une égalité d’accès au divorce ou à la séparation de corps, la loi du for s’applique (article 10). En clair, si la loi applicable ne permet pas le divorce des couples de même sexe, la loi du for s’applique.

A noter, les accords internationaux déjà signés (exemple : la convention franco-marocaine de 1981) restent en vigueur.

Conclusion : voilà qui va simplifier notre tâche à n’en pas douter dans le traitement du conflit de lois en matière de divorce.

Par Maryvonne HENRY – Avocat

Source: Juritravail

Nous ne comprenons rien aux ados. Pourquoi ?

la communication avec les ados - 2houses

Tribu inquiétante et menaçante, les adolescents sont souvent considérés comme des aliens venus d’une autre planète. Or leurs comportements étranges peuvent être décodés, et nos réactions d’adultes aussi. Analyse d’un malentendu.

Parce que nous sommes jaloux

Comment accepter sereinement de voir son propre enfant devenir séduisant et mener une vie sexuelle ? « Lorsque nous disons que les adolescents ont des comportements étranges, avance Serge Hefez, psychiatre et psychanalyste, nous parlons de nous, de notre peur de vieillir, de notre angoisse de séparation avec ces futurs adultes. Cela vaut pour tous : médias, institutions, thérapeutes… »

Et cette peur s’exprime par des jugements négatifs, des rejets violents des adolescents, ce que Philippe Gutton, psychiatre, psychanalyste et directeur de la revue trimestrielle Adolescence, n’hésite pas à appeler « la provocation adulte ». Si on y ajoute une demande excessive faite aux ados d’être en forme, de s’intéresser à tout, de ne pas se mettre en colère, d’être performant à l’école – bref, de correspondre pleinement à l’attente adulte, sans laisser place à l’expression naissante de son individualité et de son individuation –, le clash et l’incompréhension sont au bout du chemin.

Yasmine, 19 ans, en est un bel exemple : « Mes parents sont divorcés. Jusqu’en troisième, tout se passait à peu près bien, normal, quoi… Ma belle-mère était plutôt sympa. Et puis j’ai grandi vachement vite. En un an, je me suis retrouvée avec une taille de 1,76 m et une poitrine imposante. Son attitude à elle a complètement changé. Elle est devenue agressive, elle faisait des réflexions sur mes fringues, mes copains… Mon père a fait celui qui ne s’apercevait de rien. Je ne l’ai pas supporté, je n’ai plus voulu aller chez lui le week-end. Et bien sûr, ç’a entraîné des engueulades monstres avec ma mère. Du coup, je me suis réfugiée dans mon monde. Je m’enfermais dans ma chambre, je ne voulais plus leur parler, et au lycée, ç’a été la chute libre… »

L’irruption de la « génitalité » (la sexualité) dans le corps et le psychisme des enfants provoque en effet une profonde modification chez les parents. Pour Philippe Gutton, comme pour Serge Hefez, François Marty et bien d’autres psychanalystes et psychiatres, cette notion est fondamentale. « Nul ne peut échapper à ce bouleversement des rapports, conscients et inconscients », insiste Serge Gutton, auteur de Moi, violent ? .

Toute l’ambivalence des attitudes adultes est là : dans le désir de conserver l’adolescent dans son statut d’enfant, tout en se plaçant inconsciemment dans une position de rivalité et de haine. Ce que Serge Hefez symbolise par l’histoire de Blanche-Neige, victime d’une belle-mère désireuse de faire disparaître la jeune fille afin de conserver son propre statut de séductrice.

Parce que ils font tout pour ne pas être compris

La période de l’adolescence est pour les jeunes celle de la création du moi, un moi autonome, différent de celui de leurs parents. Un moment de transformation si profond, si bouleversant que Philippe Gutton n’hésite pas à le comparer au processus de création artistique. L’apparition de cette nouvelle personne au sein de la famille ressemble ainsi à l’arrivée d’un étranger qui s’imposerait sans y être invité : « l’autre » surgit soudain.

Mais où est donc passé cet enfant que l’on a élevé et dont nous étions si proches ? Le voilà qui impose des conduites bizarres, s’essaie à de nouveaux comportements vestimentaires ou capillaires, se montre désagréable, se tient mal, fume comme un pompier, ricane à tout bout de champ, écoute sa musique à fond. Autant de provocations pour l’entourage adulte – les frères et sœurs perçoivent, eux, ces changements avec humour ou agacement, mais jamais comme une remise en question d’eux-mêmes.

Le langage devient lui aussi vecteur et expression de cette recherche. « Incapable de mettre des mots sur ce qu’il ressent, l’adolescent tente de temporiser, en tordant le sens de ceux qu’il employait jusque-là, explique Philippe Gutton. Alors que l’adulte tient à la signification littérale, lexicale des mots, qu’il veut plaquer sur le désordre qu’il entend. » Dès lors, le « malentendu » s’installe.
Maxime, 16 ans, en rigole : « J’adore parler à toute vitesse en verlan avec mes copains au téléphone, surtout devant mes parents. C’est trop cool, ça les “vénère” [énerve, ndlr]. » Juliette, 14 ans, ne supporte pas d’être obligée de parler « genre vieux » avec sa famille : « J’aime bien parler normal, comme nous. Mais mon père, quand je dis à ma mère : “Comment t’es trop bien habillée”, il me reprend : “Parle correctement !” Il crie, tout ça. Trop bête… »

Le paradoxe est là : les adolescents testent, tentent, cherchent, avancent par bonds et retours en arrière, se créent en se faisant opaques, mystérieux, par référence permanente à des territoires inconnus des adultes. Mais c’est au travers même de cette incompréhension voulue, de cette provocation qu’ils recherchent la preuve de leur existence en tant que moi. Car il s’agit d’obtenir une réponse, une réaction, une résistance, qui permette de vérifier que le changement est en cours.

Et de trouver les clés à l’incompréhension qu’eux-mêmes vivent à leur propre égard : pour eux, cette transformation est source d’interrogation, de sentiment de « familière étrangeté », pour plagier l’expression des surréalistes.

Parce que notre incompréhension les construit

Il ne s’agit plus pour les adultes de se placer dans une proximité trop grande, une éternelle « compréhension », source d’angoisse pour les ados. Ainsi Oriane, 15 ans, qui fait vêtements communs avec sa mère… celle-ci ayant imposé ce système pour de prétendues raisons d’économies. La jeune fille avoue rêver d’un « bout d’étagère à moi, avec que mes trucs à moi ». Il ne s’agit pas non plus de se figer dans une rigidité comportementale, sous prétexte que les adolescents ont besoin d’un « cadre » solide, mais au contraire de trouver des terrains de rencontre, d’échange.

Comment faire pour donner au jeune le soutien dont il a besoin, tout en lui offrant la possibilité de va-et-vient nécessaires à sa prise d’individualité (passages famille-hors famille), comment ne pas « le laisser dehors, ni le tenir enfermé » ? Comment lui offrir assez de souplesse pour que cette transformation majeure du « pubertaire » s’accomplisse ?

La réponse n’est jamais toute faite. Mais les spécialistes posent tous un préalable : les adultes doivent sortir de la fusion, ne pas se projeter sur leurs adolescents, trouver la bonne distance (ni trop, ni trop peu) et ne pas se sentir cause – c’est-à-dire coupable, car l’origine des deux mots est identique – de toutes ses difficultés. Celles-ci sont, pour une part, inévitables et nécessaires. Elles font partie de l’apprentissage. Les ados sont des êtres qui échappent aux adultes. C’est normal, et souhaitable.

Et leur changement s’opère d’autant plus harmonieusement que les adultes les entourant refusent d’entrer dans le jeu pernicieux de l’étiquetage… qui excite aussitôt le désir des jeunes de répondre par la « provoc ». Ce n’est pas de tout repos… mais cela en vaut la peine. Ne pas poser de questions intrusives, mais rester ouvert à la discussion sur un sujet d’actualité, par exemple, ou sur l’expression d’une révolte par rapport à l’autorité scolaire…

Pour Serge Hefez, « les adolescents attendent des adultes qu’ils parlent avec eux de tas de choses : de politique, de leurs propres souvenirs de jeunesse… A partir de ce moment, le jeune entre dans un bain de langage qui entoure la relation. Un ado qui parle de problèmes de société, d’actualité, qui cherche la discussion – même si elle passe par l’affrontement – est un ado qui va bien ». Parce que l’adolescence, c’est aussi cette magnifique période de la vie où tout arrive pour la première fois, celle du regard neuf sur le monde, celle de tous les possibles, celle de la pureté des sentiments (au sens où ils n’ont pas encore été usés par les années), des sensations fortes et aussi de la légèreté.

Les ados nous offrent une occasion de renouer avec cette part enfouie de nous-même, de remonter à notre propre source, sans retomber dans l’envie et la nostalgie de nos jeunes années. N’en ayons plus peur et ils en sortiront grandis…
(Christilla Pellé-Douël)

Elisabeth, 45 ans, mère de Shani, « Chez nous, ça passe beaucoup par la verbalisation »

« On a traversé des épisodes très classiques. Avec Shani, nous étions dans une opposition très nette. Je crois que les premiers signes sont apparus vers 12-13 ans. Il y a eu des velléités de maquillage, auxquelles j’ai mis le holà très vite, mais à 12 ans, elle a eu le droit d’aller à une fête jusqu’à minuit. Evidemment, je savais où et avec qui. Entre nous, il y a un contrat de confiance. Nous le respectons toutes les deux. Si je dis oui, je ne change pas d’avis. Si elle le rompt, elle sait que c’est fini.

L’autre pierre angulaire, c’est l’autonomie : je l’incite à se prendre en charge et à assumer les conséquences de ses actes. Je lui explique par exemple tous les dangers d’une consommation excessive d’alcool et ceux du cannabis. Et il n’y a pas, pour l’instant, de signes de transgression. Je n’interdis rien arbitrairement. J’explique toujours mes raisons, même si elles sont émotionnelles. Chez nous, ça passe beaucoup par la verbalisation. On s’engueule souvent. Mais pour moi, l’essentiel est de toujours accepter le dialogue, de laisser la porte ouverte. »

Shani, 17 ans, en terminale, « C’est nul, ce cliché sur l’apathie des ados ! »

« C’est vrai, il y a des moments durs dans l’adolescence. Au début, j’avais du mal à parler avec ma mère. Je criais pas mal. C’est quand même la période où on n’est pas très bien dans sa peau. On cherche, on essaie de trouver une personnalité à soi, on se découvre. Moi, je voulais plus de liberté sans être obligée de rendre des comptes. Aujourd’hui, ça va vraiment mieux. On communique bien, j’ai des rapports vraiment de confiance avec ma mère et je crois que c’est réciproque. J’adore discuter avec elle, de tout et de rien. Le contrat première embauche, le conflit israélo-palestinien, la politique… comme mes amis, je suis intéressée par de nombreux sujets, et j’ai des passions comme le théâtre ou la danse.

Il nous arrive souvent d’avoir des débats sur des sujets d’actualité. Ce que j’aime, c’est la diversité des opinions. C’est nul, ce cliché sur l’apathie et l’inculture des ados ! Ce qui est un peu difficile, c’est parfois d’avoir l’impression que, comme on est entiers, pas très nuancés, les adultes ne nous prennent pas au sérieux. »

par  Christilla Pellé Douel

source: Psychologies.com

A Bordeaux, les pères divorcés partagent leurs problèmes autour d’un café

papas divorcés - 2houses

Qu’ils soient divorcés depuis des années ou plus fraîchement, une dizaine de pères bordelais se retrouvent deux fois par mois autour d’un café pour partager leurs problèmes et tenter d’apaiser la douleur de leur séparation.

A peine assis dans la petite salle d’une maison de quartier, ils se livrent sans retenue. « J’ai beaucoup de reproches à faire à la justice et aux avocats« , lance, très remonté, Raymond, un nouveau venu plein d’acrimonie à l’encontre des juges aux affaires familiales et des avocats.

Aussitôt, Alain Gallone, travailleur social à la caisse d’allocations familiales (CAF) de la Gironde, le tempère et rappelle que l’objectif du « café des pères », mis en place il y a un an avec la mairie de Bordeaux, est avant tout « un espace de parole » et « d’échange » et pas « un lieu d’opposition ».

Cet incident passé, s’ouvre un vrai dialogue entre ces papas, et nouveaux venus comme habitués se livrent facilement, comme pour se libérer du poids de leurs difficultés.

« Moi, le divorce m’est tombé dessus, mon ex m’a pris par surprise, et contrairement à moi, elle avait préparé son dossier », raconte Jean qui, depuis trois ans, se bat pour obtenir la garde alternée de son fils.

Rapidement, la majorité de ces pères reconnaissent s’être présentés devant le juge sans être prêts.

« C’est sans doute la raison pour laquelle vous avez tous exprimé des +sous-demandes+ au magistrat et accepté que votre épouse ait plus de droits que vous, notamment au niveau de la garde », fait remarquer Charles Ingles, psychologue au service petite enfance de la mairie et chargée de co-animer le café.

 » Nous en payons le prix »

Pour Raymond, cette impréparation est liée au fait qu’il s’est « senti encore plus père » quand il a divorcé. Un constat que tous les membres de l’assistance s’accordent à partager.

C’est également une des raisons pour lesquelles la majorité de ces pères, depuis des mois ou des années, multiplient les recours judiciaires pour avoir le droit de voir plus souvent et longuement leurs enfants.

« Je n’ai le droit d’être présent dans la vie de mon enfant que cinq jours par mois », déplore Paul.

Certains, comme Antoine, père de deux fillettes, reconnaissent que ce combat est épuisant et leur semble parfois vain.

« A force d’avoir un mur en face de soi, de subir des non-présentations d’enfants et de se retrouver réduit à payer sa pension alimentaire, il y a un phénomène psychologique assez fréquent, c’est celui du désinvestissement dans la relation », admet, visiblement meurtri, ce quadragénaire.

Comme beaucoup, il reproche à la justice que « toute latitude d’appréciation est donnée aux juges » et que pour eux, « c’est tout pour la mère« .

« Neuf hommes sur dix ont abandonné leurs femmes, se sont très mal comportés, et comme nous sommes l’exception, nous en payons le prix« , lui répond aussitôt Pierre, un trentenaire à l’allure sportive.

Motivé, il propose aussitôt aux participants de faire avancer les choses en se fédérant afin de faire entendre leur voix et montrer que « tous les hommes ne sont pas des salops », contrairement à ce qu’affirment « chacune de nos ex-femmes ».

Cette libération de la parole est un des principaux objectifs de ce café des pères, explique Brigitte Collet, l’adjointe au maire en charge de l’enfance et de la famille qui est une des initiatrices de ce projet original.

Un objectif atteint si l’on en croit Jean, un des pères, resté très discret, qui, en guise de conclusion, glisse que ce moment « est fait pour que dans chaque père traumatisé renaisse un père ».

source: Liberation.fr

Les enfants avant tout par « Un papa »

un enfant et papa toujours important - 2houses

Mon témoignage est un peu à contre courant des divorces énoncés sur votre site. Néanmoins, que les statistiques donnent une image meilleure du divorce ne peut que me réjouir. Tout comme la loi qui rend en grande partie obsolète le divorce par faute. Il y a déjà assez de colère dans un couple qui se sépare, et l’amour et la haine ne sont pas du domaine du raisonnable, alors les blessures de l’un de l’autre… A quoi bon rajouter une peine supplémentaire aux enfants ?

Nous avons une petite fille partie trois fois aux urgences, pour crise de spasmophilie. Mon ex-épouse a mis cela sur le compte des problèmes d’acariens, puis une autre fois sur le fait que je fume. Au final, l’allergologue a conseillé qu’elle ait rapidement une aide psychologique. Chose que je souhaitais depuis le début. Après avoir tenté bien des astuces données par mon psy, j’ai vu à quel point le déni de l’autre était d’une force redoutable. Cette psychothérapie de couple où j’espérais soit un rebondissement du couple, soit un divorce pas trop nul, s’est arrêtée sur une porte qui claque. L’ultime tentative pour une médiation fut un refus catégorique. Les moyens de la guerre donc, et d’une guerre qui n’en finit plus. Pour faire la guerre, il faut être au moins deux, et on ne peut pas décréter la paix tout seul.
Vous disiez dans cet article, que la mère est, après le divorce, tout à la fois la garante d’une autorité parentale, mais aussi celle par qui l’image du père existe encore au-delà du père. Je sais que cela arrive heureusement. Dans la recherche systématique de la casse de l’image du père, je sais que l’on me dit qu’un jour, trop en faire se retourne contre soi. Je ne voudrais pas que mes enfants et surtout la plus petite, soient tristes à nouveau. Tout cela est bien vain.
Il m’est assez difficile de comprendre toutes les motivations qui font que certains pères laissent leurs enfants. Baissent-ils les bras devant la loi ? Dans l’adversité ? Dans la lâcheté ?
La fin de mon témoignage, c’est un vœu à l’adresse des hommes et des femmes, pour que nos orgueils, nos blessures, ne soient jamais plus importants que le devenir de nos enfants.

Un papa.

Source: Psychologies.com

Mon point de vue d’avocat sur la garde alternée

garde alternée point de vue d'une avocate - 2houses

La garde alternée est à manier avec beaucoup de prudence. Le rôle de l’avocat est d’amener les parents à réfléchir aux implications concrètes de leur choix : distance école-lieux de vie, aspect matériel… On se rend souvent rapidement compte que le projet n’a pas suffisamment été réfléchi.

Nos interrogations pratiques remettent parfois en question le choix initial de parents qui n’arrivent pas à se projeter de manière concrète. En ce sens, nos questions les aident et peuvent leur éviter de se lancer dans une solution non viable sur le long terme ou toxique pour les enfants. On n’est pas là pour décider à leur place, mais pour les aider dans leur choix…

Un de nos juges aux affaires familiales propose à certains couples indécis une « garde alternée à l’essai ». Le juge renvoie l’affaire à six mois pour observer comment la garde alternée se met en place (ou ne se met pas). L’avantage de cette solution est que les parents reviennent en sachant généralement très clairement ce qu’ils veulent : « Ça a été l’horreur, nous avons très vite arrêté, le petit ne se sentait pas bien du tout… » ou au contraire, « Ce n’était pas la solution qu’on privilégiait, mais finalement on s’est organisé et ça fonctionne plutôt bien… »

La garde alternée ce n’est pas un concept, c’est du concret qu’il faut soumettre à l’épreuve du réel !

Par Claire via Psychologies.com

La condition d’ainé dans le divorce n’est pas à envier !

Votre enfant ainé n'est pas votre ami ni votre confident - 2houses

Souvent, on pense que l’enfant ainé est plus capable de comprendre et d’assumer les situations.

Hier, je lisais sur un forum une femme qui témoignait de comment elle avait mis son ainée dans la confidence de sa rencontre avec un homme. Elle racontait comment son ainée s’était sentie valorisée et avait facilité l’intégration de l’amoureux auprès des cadets ! Et bien, je dis à cette mère qu’elle s’est trompée. Sa fille n’est ni sa copine ni sa confidente. Elle ne doit pas non plus porter de secret et mettre en place des stratégies avec elle concernant sa vie amoureuse.

On peut décliner cette petite anecdote aux séparations/divorces. Nous savons tous qu’il est courant de voir l’ainé porter beaucoup.

Une patiente m’a racontée comment à l’ado, vers 15 ans, elle a du se mettre à pratiquer tel sport pour pouvoir observer son père et sa maitresse sous les ordres de sa mère. Une autre a promis à son père qu’elle cracherait sur son grand-père pour le venger.. Ou, avec des apparences moins graves, une autre de 5 ans prend régulièrement sa maman dans les bras dans l’espoir de la soulager de sa tristesse.

Le cadet, lui, est souvent plus protégé, par ses parents et par son ainé (justement !). Il n’a pas forcément une meilleure condition. Il se sent lésé. Il ne comprend pas pourquoi il n’a pas les mêmes privilèges que son ainé. Pourquoi, lui ne peut pas rester plus tard à écouter son parent ou à effectuer telle ou telle tache !

Mais, l’ainé, lui, prend tout dans la figure, en direct et sans protection.

Ne pas protéger l’ainé de l’histoire du divorce engendre chez eux :

  • Un sentiment fort de responsabilité quant à l’état de son ou ses parents. Le parent qui se confie à l’enfant ou qui lui  confère des privilèges, met l’enfant dans la position où il croit qu’il peut agir pour lui. L’enfant pense qu’il doit réussir des missions données ou imaginées. Il développe un sentiment d’échec alors même qu’il lui était impossible de réussir. L’enfant n’a pas les compétences, les moyens de soulager le parent ou de réussir ses missions.
  • Quelque soit son âge, il se sent responsable de protéger son cadet du conflit parental ou de l’état du parent  fragile. Dans le divorce, on peut voir, dans des cas graves, des dépressions, de l’alcoolisme, des crises… L’ainé apprend vite à protéger son cadet de ce qu’il observe et prend tout dans la figure. On voit aussi des enfants qui, témoin de disputes entre parents, se mettent entre les conflits et le cadet. Il tente de l’isoler au moment des passages chez l’un et l’autre. Ils ne racontent pas à leur cadet ce qu’ils voient ou entendent… Et ils finissent par s’isoler de la fratrie car ils ont le sentiment de ne plus être honnêtes avec eux. Ils s’isolent aussi car, grandissant trop vite, il existe à force un décalage entre l’ainé et le cadet.
  • Parallèlement, il peut s’en prendre à son cadet car il n’en peut plus de la situation, ou par jalousie du repos apparent de ses cadets. Pourquoi, eux, ont-ils le droit de ne pas tout se prendre dans la figure. Ils peuvent finir par être en colère contre le cadet qui peut rester un enfant alors que pas lui. On développe souvent à ces moments des jalousies maladives. Le cadet est jaloux des faveurs accordés par le ou les parents pendant que l’ainé observe et constate les bénéfices du dernier petit protégé. Chacun a le sentiment qu’il est lésé.
  • L’enfant développe une hyper-vigilance pour prévenir les dangers et qui l’éloigne de son état d’enfant. Il est tellement pris dans le conflit, des les tristesses adultes, dans les confidences,  – tellement en première ligne, qu’il se sent responsable de soulager ses parents, ses cadets. Il met alors en place un système d’hyper-vigilance pour pouvoir éviter les problèmes et les souffrances. C’est ainsi qu’on voit les enfants développer des angoisses puisqu’ils voient le danger partout. Ces enfants finissent par perdre de leur naïveté et devance tout. Ils s’épuisent à chercher la faille pour l’éviter ou résoudre le problème !
  • L’enfant manifeste un sentiment de loyauté / trahison très fort. Au lieu de regarder le monde à travers les yeux de la naïveté et de la simplicité, il le regarde avec le sentiment qu’il DOIT quelque chose. S’il a la chance d’avoir maman qui se confie à lui ou papa qui lui donne des missions, il lui doit bien quelque chose. Il se sent privilégié d’avoir gagné la confiance de son ou ses parents.  Or, cette confiance entraine ce sentiment de loyauté et de trahison fort. Et ces sentiments isolent l’enfant qui finira par développe un grand sentiment de solitude.
  • Il tend à faire des actes manqués pour se protéger. Ces actes manqués sont souvent perçus par les parents comme des preuves de trahison. Par ex, j’ai un petit bonhomme de 12 ans qui a oublié de faire signer son carnet par sa maman et qui se retrouve obligé de le faire par l’amoureux de sa mère. On se doute bien que le père sera furax ! Si on demande à l’enfant s’il l’a fait exprès, il répondra que non. Mais si on regarde l’histoire qu’il a avec son père, on comprend qu’il veut pouvoir se détacher des missions que celui-ci lui donne. En faisant cette erreur, il se donne inconsciemment le moyen de se décoller de son père qui critique en permanence sa maman et qui lui demande de participer !
  • Il peut se mettre à rejeter plus ou moins fortement l’autre parent pour s’assurer une sérénité (apparente) chez ce parent ! Un parent me donne de grands avantages en m’offrant ses confidences, ses pleurs et ses secrets. Ce parent en me permettant de me coucher plus tard, en me prenant pour un adulte, en allant au resto avec moi, …. me donne un sentiment d’être unique. Mais cela a un prix : la loyauté. Pour pouvoir continuer à bénéficier de ces privilèges, je vais devoir accepter de rejeter ou au moins critiquer mon autre parent. Ou seulement dire que c’est moins bien !

La condition d’ainé n’est décidément pas à envier dans le divorce/ séparation. Je dirai surtout qu’il ne faut jamais mêler aucun enfant au conflit, même à 20 ans !

Je finirai en disant que l’une des erreurs des parents et des JAF, est de statuer sur un droit de visite et d’hébergement libre. L’ainé, quand il n’a pas pu se protéger ou quand il a été pris dans les griffes de colère ou de tristesse d’un parent, n’est plus en mesure de dire librement qu’il souhaite aller chez son autre parent.

Je comprends sincèrement le dilemme des JAF qui entendent un enfant refuser d’aller voir un parent. Cet enfant est-il libre de sa pensée ou existe-t-il un réel conflit ? Parfois, le JAF tombera juste en acceptant ou refusant le DVH libre, parfois il mettra l’enfant dans une situation impossible !

Et si dans un monde idéal, un divorce n’était pas l’occasion de se déchirer ?

par Elodie CINGAL

La garde alternée en cinq questions

garde alternée , les bonnes pratiques - 2houses

Dix ans après la promulgation de la loi sur la résidence alternée, celle-ci continue de progresser et de faire débat. Nous avons demandé à la psychothérapeute Nicole Prieur d’aider ceux qui font ce choix à le vivre au mieux. Et à deux enfants devenus adultes de nous raconter leur existence entre deux maisons.

L’équilibre affectif. Un même argument brandi par les adeptes et par les opposants de la garde alternée. Proposée par Ségolène Royal, alors ministre déléguée à la Famille, à l’Enfance et aux Personnes handicapées, la formule, novatrice, revenait à affirmer le bénéfice, pour l’enfant, de partager le quotidien de chacun des parents. Le recul a permis au pédopsychiatre Maurice Berger de constater l’apparition de troubles liés à la discontinuité des lieux de vie et des figures d’attachement. Il préconise d’éviter la formule avant l’âge de 6-7 ans. D’autres, tel le psychiatre et psychanalyste Bernard Golse, auteur des Destins du développement chez l’enfant (Érès, 2010), la déconseillent avant 2-3 ans… Bref, le débat fait rage chez les experts.

À Psychologies, nous sommes plusieurs à pratiquer la garde alternée, convaincus que, lorsqu’elle est voulue dans l’intérêt de l’enfant, elle constitue la moins mauvaise des solutions. L’autre éventualité le condamnerait à être privé de grandir auprès de l’un de ses parents. Conscients du bouleversement engendré par la perte de sa cellule familiale d’origine, la constitution de nouveaux couples parentaux, etc., nous avons demandé à Nicole Prieur, longtemps experte près la cour d’appel de Paris dans des situations de séparation difficiles, de faire le point sur les précautions à prendre afin que l’enfant s’acclimate au mieux à sa nouvelle vie.

La garde alternée convient-elle aux tout-petits ?

De nombreux psys recommandent de l’éviter avant les 2-3 ans de l’enfant. Un point de vue que partage en partie Nicole Prieur, compte tenu du fait que, avant cet âge, son « continuum d’existence » – la représentation de sa propre permanence et de celle du monde qui l’entoure – n’est pas assez solide. « Les séparations répétées, alors qu’il ne se repère pas dans le temps, engendrent chez lui une forte angoisse existentielle : il n’est pas sûr que le parent qui disparaît continue d’exister, ni de continuer à exister à ses yeux. »

Un argument qui pousse à préserver une certaine stabilité dans son cadre de vie, mais aussi à lui permettre de voir son autre parent assez fréquemment. « Cela dit, je me refuse à avoir une position de principe sur cette question, poursuit- elle. Il m’est arrivé de la recommander pour des bébés de quelques mois dont les deux parents étaient fortement investis dans les soins de maternage, et de la proscrire pour des enfants plus âgés, lorsque ce choix correspondait surtout au désir de punir l’ex-conjoint. »

Pour le sociologue Gérard Neyrand, auteur de L’Enfant face à la séparation des parents (La Découverte, 2009), rien ne permet d’affirmer que la résidence alternée est plus préjudiciable pour le bébé que la résidence unique chez sa mère, si ce n’est des considérations idéologiques éculées.

Quel que soit l’âge, l’enfant doit-il être consulté ?

« On se soucie bien sûr de ses émotions, mais en aucun cas on ne lui demande s’il préférerait vivre avec l’un ou l’autre, prévient Nicole Prieur. Ce serait le placer face à un choix impossible et à un traumatisme durable. » Pour l’aider à apprivoiser son nouveau rythme, on peut recourir au dessin : expliquer, à l’aide d’un génogramme, que le trait qui relie ses deux parents est rompu, mais que celui qui relie l’enfant à chacun d’eux est indélébile ; ou placer un calendrier sur le frigo, colorier les cases de couleurs différentes selon qu’il est chez l’un ou l’autre, déplacer un bonhomme magnétique qui le représente, etc.

Les parents doivent-ils avoir réglé tous leurs conflits ?

Deux lectures pour un choix éclairéD’un côté, un ouvrage plutôt alarmiste, qui se veut le premier à décrire avec précision les troubles présentés par beaucoup d’enfants en situation de résidence alternée – ou la parole scientifique opposée à l’idéologie. De l’autre, une enquête qui donne la parole aux enfants, aux pères et aux mères à qui la formule réussit plutôt bien – un « message de paix » au secours des familles déchirées. Deux livres à découvrir en complémentarité pour mener sa propre expérience.

Divorce, séparation : les enfants sont-ils protégés ? sous la direction de Jacqueline Phélip et Maurice Berger, préface de Bernard Golse (Dunod, 2012). 
La garde alternée, du sur-mesure pour nos enfants de Marta de Tena, préface de Ségolène Royal (JC Lattès, 2012).

Le député UMP Richard Mallié a déposé une proposition de loi visant à imposer la résidence alternée par défaut si les parents ne parviennent pas à se mettre d’accord. Pour Nicole Prieur, « c’est une folie. L’absence de consensus signale que les parents ne sont pas encore en mesure de laisser leurs conflits de côté pour s’entendre en ce qui concerne l’enfant. Dans ce cas, la résidence alternée constitue un terreau fertile à l’embrasement. Les vêtements qui se perdent, les livres que l’on oublie, tout devient un motif de disputes ». L’enfant passe de l’un à l’autre avec la peur au ventre, redoutant leurs questions sur ce qui se passe de l’autre côté.

« Attention à ne pas le transformer en œil de Moscou ! » recommande la thérapeute. Et d’expliquer : « La théorie systémique considère que le conflit est une manière de maintenir un lien. Pour bien vivre la résidence alternée, il faut avoir accepté la séparation au plus profond de soi. » Être capables de se respecter mutuellement comme parents. De renoncer à transformer l’autre et à avoir un droit de regard sur ce qui se passe chez lui. Et de parvenir à considérer sa deuxième vie comme une richesse supplémentaire.

L’enfant doit-il avoir une chambre de chaque côté ?

La mise en place de la garde alternée soulève des questions d’ordre matériel. Elle nécessite que les parents ne vivent pas trop loin l’un de l’autre, que l’école soit de préférence à mi-chemin. S’il est d’usage qu’il n’y ait pas de pension alimentaire, la contribution financière à la vie de l’enfant est rarement équitable (l’un prenant à charge les frais de santé plus que l’autre, par exemple), suscitant parfois des frictions.

Par ailleurs, il est fréquent que l’un des parents emménage dans un appartement plus petit, tandis que l’autre conserve la maison où ils ont vécu ensemble. L’enfant peut alors avoir sa propre chambre d’un côté, mais devoir en partager une de l’autre. « Il s’en soucie moins que le parent, qui se reproche de ne pas pouvoir lui offrir mieux, assure Nicole Prieur. Ce qui importe à l’enfant, qu’il occupe une chambre ou un coin de studio, c’est d’avoir le sentiment que sa présence compte dans chacun de ses deux foyers, qu’il a sa place et qu’il est attendu. »

Ce qui est terrible pour lui : que son lit serve de débarras en son absence. « L’espace qui lui est attribué est une projection de son espace intérieur, décrypte la thérapeute. L’invasion de son lieu est vécue comme une intrusion intime. »

Quand vaut-il mieux arrêter l’alternance ?

L’entrée dans l’adolescence s’accompagne fréquemment d’un changement de rythme. L’enfant formule parfois le souhait d’allonger le temps de l’alternance : deux semaines chez chacun plutôt qu’une, ou même parfois un an sur deux. « Mais, bien souvent, la peur de blesser ses parents ou l’incapacité, parce qu’il a toujours vécu comme cela, de reconnaître que ce système ne lui convient plus l’empêche d’exprimer son besoin de réaménager son mode de vie », signale Nicole Prieur. On sera alors attentif à repérer les signes de son malaise, pas toujours faciles à différencier des affres de l’adolescence. « Et on n’hésitera pas à lui proposer d’aller parler avec un psy, préconise-t-elle. Celui-ci pourra l’aider à examiner ses motivations. Et éventuellement à présenter sa requête au parent qu’il craint de blesser en choisissant de le quitter. »

Car il arrive souvent un moment où l’adolescent aspire à s’installer à un seul endroit, lorsque la logistique de la garde alternée, ajoutée à sa charge de travail scolaire et à ses activités extrascolaires, devient trop pesante. « Les parents redoutent alors qu’il fasse le choix de la facilité : aller vivre avec le plus coulant des deux. Mais j’ai vu des enfants opter au contraire pour le plus exigeant, celui avec lequel ils avaient l’impression de pouvoir mieux exprimer leurs talents. Ou bien ils choisissent de vivre avec le parent de même sexe à un moment où c’est important pour leur construction identitaire. »

Reste que cette décision est difficile à digérer pour celui qui se sent délaissé. D’où l’importance de travailler ce choix avec un thérapeute, qui pourra également aider le parent à admettre que l’intérêt de son enfant est un jour de vivre loin de lui, sans que cela soit vécu comme un rejet mais comme le cours normal de l’existence, même si ce moment arrive plut tôt que prévu.

« Cela m’a donné une grande capacité d’adaptation »

Hugo, 23 ans, étudiant

« J’avais 12 ans quand mes parents se sont séparés. Mon frère, 9. Nous changions de maison une semaine sur deux. Quand je suis entré en troisième, le rythme est passé à quinze jours. De l’avis général, ça paraissait mieux. J’en ai été soulagé : une semaine, ça ne laisse pas le temps de s’installer. C’était d’autant plus difficile que nous avions pas mal d’activités et que mes parents habitaient relativement loin l’un de l’autre. Mais ils faisaient tout pour nous faciliter la vie. J’ai un bon souvenir des trajets en voiture avec ma mère et mon frère pour aller au collège, depuis Saint-Ouen, où elle vivait, jusqu’au Ve arrondissement, où était mon père.

J’ai moins souffert de la séparation et de la garde alternée que de mon passage en sixième dans un nouveau quartier, avec des codes différents. Mon père a refait sa vie, pas ma mère. Chez l’un et chez l’autre, c’était très différent : on se faisait des super plateaux-télé chez ma mère ; chez mon père, c’était proscrit, mais il y avait toujours des gens intéressants. J’ai développé une belle amitié avec ma belle-mère. Elle a apporté de la qualité de vie dans notre tanière de garçons.

Je crois que la garde alternée m’a donné une grande capacité d’adaptation, une meilleure acceptation des gens. J’en garde aussi le besoin de bouger d’un milieu à l’autre, je ressens ça comme une richesse. J’ai également à cœur, lorsque je suis accueilli chez quelqu’un, de repartir en effaçant les traces de ma présence. Je me suis pourtant toujours senti à ma place dans mes deux maisons, mais je n’aime pas déranger. Si cela se présentait, je choisirais ce système pour mes enfants. »

« J’ai développé différentes facettes de ma personnalité »

Marie, 35 ans, juge

« Au début – j’avais 5 ans –, je vivais deux semaines avec mon père, une semaine avec ma mère. Cela avait été décidé comme ça parce que ma mère n’avait pas encore de logement, mais sans doute aussi en compensation pour mon père – c’était elle qui était partie. Rapidement, j’ai demandé à passer une semaine avec chacun, j’avais besoin que ce soit équitable. J’ai beaucoup investi l’école, car c’était mon seul lieu de stabilité, et j’ai fait une très bonne scolarité. À 15 ans, je suis allée vivre chez mon père à plein-temps. Ma mère était partie en province, je la voyais un week-end sur deux. Puis j’ai passé trois ans chez elle, jusqu’au bac, et de nouveau deux ans avec mon père. Ça s’est équilibré naturellement.

J’ai eu des frères et sœurs de chaque côté. J’en ai été heureuse. J’ai éprouvé plus de jalousie chez mon père, peut-être parce que ma belle-mère faisait des différences entre ses enfants et moi. En même temps, j’étais la grande, je l’aidais et c’était gratifiant. Je n’ai pas été malheureuse dans ce système. Quand on est enfant, avoir deux fois plus de cadeaux à Noël et aux anniversaires, ça compte.

Ado, les conflits avec mes parents n’avaient pas le temps de dégénérer avant que je change de maison. Adulte, j’ai eu plus de mal à me stabiliser. J’ai conservé, un temps, l’habitude de partir au moment où les choses se gâtaient. J’ai rencontré mon compagnon tardivement. Mais, globalement, je crois que cette situation m’a permis de développer différentes facettes de ma personnalité. J’ai eu plus d’adultes sur lesquels m’appuyer. Deux couples parentaux desquels m’inspirer. Aujourd’hui, j’ai deux enfants. Mon mari s’en occupe beaucoup. Nous imaginer séparés me fend le cœur. Mais je trouverais injuste que l’un de nous soit privé des enfants, et les enfants de nous. »

Par Laurence Lemoine via Psychologies.com

Paternité volée, l’arrache-cœur

pères et enfants, déchus de leur droit de visite - 2houses

Les ruptures difficiles laissent souvent les pères sur le bord de la route. Et pour continuer à voir leurs enfants, certains doivent se battre contre des mères devenues leurs rivales. Des hommes en colère témoignent.

Sa compagne est partie au terme de sa grossesse sans laisser d’adresse. Ni d’explications. Déboussolé et meurtri, Jean-Marc Wencker, ne s’en est pas remis : « Réfréner son instinct paternel est une descente en enfer », écrit-il dans son livre. Il appartient à cette génération de pères présents à l’échographie, à l’accouchement – auquel ils participent même parfois. En face d’eux : des femmes socialement émancipées qui n’ont plus le monopole du lien charnel avec le nouveau-né. Entre ces pères maternants et ces mères autonomes, il arrive que la rivalité éclate et se transforme en guerre, faisant des enfants les otages de leur mère. « Ces hommes qui ont vu et parlé au fœtus sont des “papas immédiats”. Comment voulez-vous qu’ils ne vivent pas la séparation de manière désastreuse ? s’indigne le psychanalyste Didier Dumas. Eloigner un enfant est un acte archaïque et narcissique ! »

La gestion du manque

Jean-Marc Wencker utilise, pour se désigner, une expression terrible : « père jetable », qui est également le titre de son livre. « Le faire a été ma façon d’être père à distance, reconnaît-il. L’écriture est une alliée qui m’a permis de sublimer une paternité incomplète. En écrivant, je pleurais sans geindre… » Philippe, 40 ans, s’exprime d’un ton saccadé, tant il peine à contenir sa souffrance. « Mon ex-femme a entamé une procédure de divorce alors que notre fils, Tristan, fêtait ses 5 ans. Elle a fait bien pire que de le prendre en otage : elle a tenté de me supprimer de sa vie. Elle n’a pas réclamé de pension, mais elle s’est battue avec férocité pour me retirer l’autorité parentale. En attendant la décision du juge aux affaires familiales de Nanterre, je n’ai pas vu Tristan pendant six mois… Un dimanche de novembre, gris et glacial, en voyant sa chambre vide, mon manque a atteint une telle intensité que je suis parti en voiture, roulant sans fin et sans but précis. L’image de cette chambre déserte me restera à jamais. »

Confronté à cette épreuve qu’est le « manque de l’enfant », chacun tente de rester papa à sa manière : « Beaucoup écrivent, remarque le psychanalyste Jacques Arènes. Livres, journaux intimes, courriers… une façon de sublimer leur détresse à travers une paternité fantasmée. » Emu, il se souvient de cette jeune patiente, future maman, enquêtant sur les traces d’un père mort, « confisqué » par sa mère après leur divorce : « Cet homme avait sombré dans l’alcoolisme et était devenu SDF. Il a fallu des mois à sa fille pour retrouver son foyer d’hébergement. Ses copains de galère lui ont alors raconté comment il donnait vie à cette paternité supprimée, montrant à tout le monde des photos de cette petite fille qu’il adorait, parlant d’elle des nuits entières. »

Mères diabolisées, pères victimisés…

Dans cette difficile gestion de l’absence, de la souffrance, le langage est décisif : « Un père absent est fonctionnel dès lors qu’il existe en termes valorisants dans la bouche de la mère, constate Didier Dumas. Même un père mort dont une mère parle avec respect permet à l’enfant de faire son œdipe… » L’écrivain Richard Morgièvre a vécu trois divorces. Il a gardé des relations sereines avec les mères de ses enfants. Son travail d’introspection à la suite de ses ruptures lui a permis de prendre un certain recul : « Perdre ses enfants de vue, c’est perdre son clan, sa virilité. Quand on l’empêche d’être père, un homme souffre tellement qu’il revit son enfance peuplée de peurs primales comme l’abandon, la castration. Pour survivre et rester père mythique, nous devons reconquérir notre virilité. Or celle-ci passe indiscutablement par une territorialité avec nos enfants. Là-dessus, il n’y a pas de négociations possibles avec les mères ! »

Jean-Marc Wencker, lui, s’emporte contre le chantage dont certaines mères useraient pour se venger d’eux. « Elles nous infantilisent en nous “confisquant” nos propres enfants comme l’on “confisque” un jouet pour punir un petit garçon de ses fautes. Mais de quelles fautes ? » La faute… Ce mot revient comme un leitmotiv dans le discours de couples où disqualification conjugale est confondue avec disqualification parentale… « Dans la séparation, les femmes ont envers les pères une énorme agressivité », constate sans juger Jacques Arènes. Mais la « violence » des mères a aussi ses raisons. Le psychanalyste en avance une : la revanche des mères sur des siècles de domination économique par les pères. « Aujourd’hui, le seul domaine où les hommes n’ont plus de pouvoir est la famille », dit-il. Une analyse radicale qui ne fait pas l’unanimité. « Le matriarcat n’a jamais existé, rétorque Didier Dumas. Quant à la confiscation de la paternité, elle ne date pas d’aujourd’hui. La loi de 1970 sur l’égalité dans l’autorité parentale est le début de la mise au pouvoir des mères, ce qui ne signifie pas l’avènement du pouvoir des femmes, bien au contraire. »

Une nouvelle guerre des sexes ?

La guerre des sexes se serait donc sournoisement déplacée sur le terrain de la famille. Pour Emmanuelle Didier-Weil, psychanalyste, ce discours sur les mères est inacceptable : « Père jetable ? Comme des préservatifs ? C’est prêter aux mères des sentiments bien bas. Dans une société individualiste obsédée par l’autonomie, j’y vois juste une difficulté pour les mères à se positionner. Et pourquoi ne parle-t-on pas des pères qui se confisquent eux-mêmes leur paternité ? Vous savez, ces nombreux hommes qui renoncent par déni à gérer une séparation, “trop compliquée” et qui fuient, là où les femmes se battent ! »

La réalité est donc plus ambivalente qu’il n’y paraît. Ces mères « coupables » sont aussi celles qui assument le quotidien, quand les pères ont tendance à pratiquer la fuite en avant… Le travail de Christine Castelain-Meunier, sociologue, sur le nouveau rôle des pères dans les familles recomposées, est édifiant. Elle dénonce le fantasme autour de ces mères belliqueuses qui rêvent d’élever leur progéniture « sous elles », à l’instar de la louve romaine. Refusant d’adhérer à l’idée que la guerre des sexes s’est déplacée sur le terrain familial, elle raisonne en sociologue : « La réalité montre que les femmes sont plus aptes socialement que les hommes à créer des réseaux éducatifs – amies, grands-mères, copines, relations – au bénéfice des enfants. Le combat des pères pour maintenir des relations avec l’enfant s’exprime de plus en plus fortement, mais sans se concrétiser systématiquement sur le long terme. Réfléchissons sur la vraie nature de ces empêchements, dont les femmes ne sont pas toujours à l’origine. »

Comme nombre de ces pères « jetés », Franck, 39 ans, a un petit garçon de 4 ans. Il récuse cette vision des choses. « Je trouve humiliant, s’indigne-t-il, que les hommes aient à passer continuellement des examens pour prouver leur compétence paternelle. Dans ces conflits égoïstes, on oublie trop souvent les vraies victimes : les enfants !

Par Jean-Baptiste Drouet via Psychologies.com