Pourquoi faire de ses enfants les « messagers » ne fonctionne pas…

La tentation peut être grande de confier à son enfant les messages – qu’ils soient d’ordre pratique ou d’un autre ordre- que l’on souhaite transmettre à l’autre parent. C’est tentant parce que c’est facile….N’oublie pas de dire à ton père (ta mère) que…. Tout aussi tentant est de croire sur parole les messages des enfants ou alors ce que les enfants racontent de leur vécu chez l’autre… C’est réconfortant de s’imaginer que l’on peut avoir « totalement confiance » dans ce que dit son enfant.

C’est oublier que les enfants sont comme tout le monde, des êtres en construction. Qui tendent peut être vers une honnêteté et une intégrité irréprochable mais qu’ils n’en sont pas toujours empreints ; c’est même précisément notre rôle d’adulte de les guider sur ce chemin là. La transparence, l’honnêteté, le discernement, la conscience réelle de ce qui se passe ne sont pas innées, elles s’acquièrent.

Or, les messagers, à leur insu le plus souvent, « chargent » les messages d’émotions, d’interprétations qui sont les leurs, ou celles qu’ils ont cru déceler chez leur parent. Le message ainsi délivré peut être assez éloigné de la réalité.  Les enfants utilisent inconsciemment les endroits blessés de leur parents qui prennent plaisir à dire ou à entendre du mal de l’autre (On peut avoir du mal à l’admettre, mais au fond de nous, nous savons qu’elle existe cette part qui se réjouit ainsi). Plus subtilement, il peut s’agir de l’interprétation de l’attitude de l’enfant, par exemple : j’ai trouvé Paul triste et fatigué en le récupérant chez son père.. grande est la tentation (qui nourrit le ressentiment) d’en imputer la responsabilité au père en question sans aller à la source.

Le danger est alors double : les parents sont confortés dans le rejet l’un de l’autre, et dans leur conflit ; les enfants sont déstabilisés et insécurisés. Déstabilisés et insécurisés car ils deviennent malgré eux des acteurs du conflit de leurs parents, donc des acteurs directs de leur « cadre », alors qu’ils ont au contraire besoin d’évoluer dans un cadre prédéterminé..

Il est donc de la plus grande importance que les parents communiquent directement, s’interrogent directement plutôt que prendre, ou de se contenter de, leurs enfants comme relais.
Nombreux sont les parents divorcés qui, en toute bonne foi, cherche à faire du mieux qu’ils peuvent pour le bonheur de leurs enfants, mais dont les relations avec l’autre parent se limitent à des échanges d’informations pratiques. La transmission de  « tout le reste », c’est-à-dire la façon dont les enfants grandissent et s’épanouissent chez l’autre (ce qui, en garde alternée représentent quand même la moitié du temps) est laissée aux soins des enfants avec les biais et les risques évoqués.

Pour la sécurisation des enfants et la paix des parents, il est donc urgent de favoriser tous moyens permettant à ces derniers d’échanger directement, sereinement et sans jugement sur les états d’âme de leurs enfants, les faits qui les ont marqué, l’atmosphère dans lesquelles ils vivent….tous ces éléments non factuels et pourtant déterminants pour offrir en commun un cadre sécurisé et stabilisé aux enfants.